Tout organisme, du plus complexe au plus unicellulaire, suit un cycle de vie. Chez les êtres humains, ce cycle commence lorsque l'enfant est encore dans le ventre de sa mère et se termine, s'il n'est pas interrompu, par une « mort de vieillesse » (c'est-à-dire la mort causée par une ou plusieurs maladies liées à la vieillesse). Grâce à la technologie et aux connaissances médicales de notre époque, les Européens vivent en moyenne jusqu'à 81,3 ans. Il est possible qu'à l'avenir, nous vivions plusieurs années, décennies ou même siècles de plus. Pour atteindre cet objectif, nous ne devons pas seulement guérir les maladies qui provoquent la mort. Nous devons avant tout comprendre le fonctionnement du vieillissement, puis trouver des moyens de le ralentir, voire de l'arrêter. Examinons donc ce qui arrive à notre corps lorsque nous vieillissons.
9 traits distinctifs du vieillissement
Le vieillissement est un processus progressif très complexe qui conduit un organisme (dans notre cas une personne) à des fonctions altérées et qui accroît sa vulnérabilité à la mort. L'âge figure en effet en tête de liste des facteurs de risque de maladies telles que les cardiopathies et les cancers, qui sont actuellement les principales causes de décès dans le monde.
Au cours des dernières décennies, la recherche sur le vieillissement a connu une avancée exceptionnelle, notamment avec la découverte du contrôle du vieillissement, du moins dans une certaine mesure, par des voies génétiques et des processus biochimiques. Différentes recherches ont permis de définir 9 caractéristiques qui représentent les dénominateurs communs du vieillissement dans différents organismes. Leur relation est interconnectée et l'objectif de la future technologie médicale sera de comprendre ces connexions et de s'attaquer à tous les différents aspects du vieillissement.
L'instabilité génomique
Chaque cellule qui compose notre corps (et nous en avons des milliards et des milliards) contient un jeu d'instructions complet qui, à lui seul, pourrait nous reconstruire à partir de zéro. Ce jeu d'instructions s'appelle le génome et se compose de séquences de nucléotides d'ADN. Parmi d'autres choses, notre génome contient les instructions visant à la création des protéines, qui sont essentielles au bon fonctionnement de nos cellules.
Normalement, nos cellules somatiques se divisent en deux cellules génétiquement identiques : le matériel génétique est répliqué et les éventuelles erreurs ou dommages sont réparés. Comme le processus n'est pas parfait, des mutations peuvent se produire pendant la division cellulaire. Heureusement, notre organisme dispose de mécanismes intrinsèques de réparation de l'ADN qui peuvent réparer la plupart de ces erreurs et d'autres dommages à l'ADN dus à des facteurs génotoxiques externes (comme, pour n'en citer qu'un, les rayons ultraviolets du soleil).
Ces mutations se produisent tout au long de notre vie. Mais le problème est qu'en vieillissant, nos mécanismes de réparation s'affaiblissent et ne sont plus capables de réparer efficacement les mutations. L'instabilité génomique est le terme que nous utilisons lorsqu'il y a une tendance accrue à l'altération du génome pendant la division cellulaire. Le génome muté peut produire des protéines brisées. Il en résulte des cellules dysfonctionnelles qui s'accumulent au fil des ans.
Si une seule cellule défectueuse ne pose pas de problème, lorsqu'elles sont nombreuses dans un même tissu, elles peuvent en revanche compromettre la fonctionnalité de l'ensemble du tissu. Cela dit, si nous pouvions trouver un moyen d'empêcher nos mécanismes de réparation de l'ADN de s'affaiblir avec l'âge ou si nous pouvions soutenir leur travail crucial avec des médicaments spécifiques, nous pourrions trouver un moyen de lutter contre l'instabilité du génome.
L'attrition des télomères
As-tu déjà entendu parler des télomères? Les télomères sont des parties éliminables de l'ADN qui ne contiennent aucune information génétique utile. Ils se situent à l'extrémité des chromosomes (l'ADN que l'on trouve dans le noyau de chacune de nos cellules).
Le rôle des télomères dans la réplication cellulaire est crucial. En effet, chaque fois qu'une cellule se réplique, une petite partie des bords des chaînes d'ADN, les télomères, se perd dans le processus. Si les télomères n'existaient pas, la partie principale du chromosome raccourcirait et des gènes essentiels à la vie seraient perdus. L'attrition des télomères est le nom utilisé pour désigner le raccourcissement des télomères après chaque division cellulaire.
Vu que des fragments de télomères sont perdus après chaque réplication, les nouveaux chromosomes auront des télomères de plus en plus courts. Finalement, l'ADN sera laissé sans protection et les cellules ne pourront plus se répliquer. Lorsqu'une cellule ne peut plus se répliquer, elle devient sénescente ou se tue. À cause de l'attrition des télomères, au fil des ans, notre corps devient incapable de créer de nouvelles cellules et de se défendre contre les maladies.
Pourtant, il pourrait y avoir des solutions à l'usure des télomères.
- Premièrement, nos cellules souches (cellules qui n'ont pas de fonction spécialisée) produisent une enzyme appelée télomérase qui reconstruit les morceaux ou télomères perdus lors du processus de division cellulaire. Les cellules spécialisées ne sont pas capables de produire elles-mêmes cette enzyme utile, mais nous pourrions les activer par le biais d'une thérapie à la télomérase. Telocyte est une entreprise qui travaille sur ce sujet : grâce à la télomérase, elle reconstruit les télomères des cellules du cerveau qui sont devenues dysfonctionnelles à cause de la maladie d'Alzheimer.
- Deuxièmement, les cellules cancéreuses peuvent reconstruire leurs télomères indéfiniment. Nous ne savons pas exactement comment elles s'y prennent, mais si nous pouvions comprendre le mécanisme, nous pourrions peut-être le reproduire pour nos propres cellules.
Altérations épigénétiques
Comme nous l'avons vu ci-dessus, toutes les cellules de notre corps, quel que soit leur rôle, contiennent le même génome. Cependant, ces cellules ont des rôles différents et remplissent des fonctions différentes (par exemple, les cellules du cerveau et les cellules musculaires). Comment cela est-il possible ?
La réponse réside dans les modifications dites épigénétiques. Il s'agit de changements réversibles (causés par des composés chimiques) qui activent et désactivent certaines parties de notre ADN, sans modifier la séquence du code génétique. Si toutes les cellules ont le même génome, les cellules spécialisées ont des épigénomes différents qui influencent la production de protéines spécifiques, définissant la fonction des cellules. Les modifications épigénétiques se produisent normalement dans le corps humain. Par exemple, nous naissons avec un nombre élevé de cellules-souches, qui se spécialisent dans différents tissus en activant ou non les gènes contenus dans les chaînes d'ADN.
Au fil des ans, plusieurs facteurs externes, tels que les nutriments, la pollution, les substances toxiques (tabagisme), le stress et l'inflammation, peuvent déclencher des altérations épigénomiques. Des gènes qui devraient être inactifs sont activés et vice-versa, créant ainsi des cellules qui fonctionnent mal.
Heureusement, il existe peut-être un moyen d'éliminer les altérations épigénétiques et de ramener le génome à son état initial. En 2016, des scientifiques du Salk Institute ont réussi à réinitialiser l'épigénome de souris en les exposant à un cocktail de produits chimiques appelés facteurs de Yamanaka. Cette procédure peut transformer des cellules spécialisées en cellules-souches non spécialisées, réinitialisant ainsi leur épigénome. Pourrions-nous utiliser une procédure similaire pour rajeunir les cellules humaines ?
Perte de la protéostase
Les protéines permettent à nos cellules de tout faire, qu'il s'agisse de détecter l'environnement, de digérer les aliments, de contracter un muscle, d'envoyer des signaux électriques, etc.
Ce que nous définissons comme une perte de protéostase est l'accumulation, au fil des ans, de protéines endommagées, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de nos cellules. Les mécanismes de réparation de notre corps ne peuvent pas faire grand-chose pour réparer ces protéines endommagées et leur accumulation peut nous conduire à plusieurs maladies: Alzheimer, Parkinson, troubles métaboliques et insuffisance cardiaque.
Comment résoudre ce problème ? Trois approches sont possibles :
- Ralentir l'accumulation des protéines endommagées.
- Contrecarrer leurs effets négatifs.
- Détruire ou éliminer ces protéines.
Plusieurs études ont été réalisées sur chacune de ces approches. Un exemple réussi de la dernière approche a été appliqué au traitement d' Alzheimer dans la récente étude Alzheimer Management by Albumin Replacement (AMBAR) menée par Grifols. Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont prélevé du sang dans le corps des patients, l'ont débarrassé de ses déchets et de l'une des protéines endommagées (amyloïde bêta) qui est à l'origine de la maladie. Une fois réinjecté, le sang nettoyé a drainé cette protéine nocive du cerveau, ralentissant ainsi la progression de la maladie de 50 %. Bien que cette technique ne soit pas une solution définitive, elle montre que les procédures médicales et les médicaments peuvent aider à lutter contre la perte de protéostase.
Détection déréglée des nutriments
Pour fonctionner, toutes les cellules de notre corps ont besoin de nutriments qui sont absorbés à partir des aliments que nous consommons. Nos cellules disposent de mécanismes spécifiques qui leur permettent de détecter quand les nutriments sont abondants les cellules accélèrent la croissance et le métabolisme) et quand ils sont peu abondants (il est donc temps de ralentir).
Ces mécanismes contribuent également à maintenir le niveau de nutriments dans notre circulation sanguine dans une fourchette saine. Par exemple, les cellules du pancréas réagissent à l'augmentation de la glycémie en produisant de l'insuline, qui signale aux cellules d'absorber le sucre de notre sang. Si elles ne le faisaient pas, la quantité élevée de sucre endommagerait plusieurs organes. Lorsque nous vieillissons, ces mécanismes de détection commencent à mal fonctionner (ils deviennent les causes sous-jacentes de l'obésité liée à l'âge, du diabète de type 2 et des maladies métaboliques).
Si nous pouvions mieux comprendre notre mécanisme de détection des nutriments, nous pourrions peut-être prolonger notre durée de vie et notre espérance de vie en bonne santé. L'activité de nos cellules pourrait en effet être régulée par des médicaments spécifiques, de sorte que le taux métabolique diminue et, avec lui, la quantité de dommages accumulés au fil des ans.
Dysfonctionnement mitochondrial
Une fois que les nutriments pénètrent dans nos cellules, de petits organites appelés mitochondries les convertissent en énergie que les cellules peuvent utiliser pour fonctionner et survivre. Cette énergie est appelée adénosine triphosphate ou ATP et, pour cette raison, les mitochondries sont considérées comme les "centrales électriques" des cellules. Les mitochondries possèdent leur propre ADN, différent de celui contenu dans le noyau, qui les aide à créer les protéines dont elles ont besoin pour leur fonction spécifique.
Le dysfonctionnement mitochondrial peut être causé par plusieurs facteurs. Si la structure de la membrane de la mitochondrie est altérée, si les protéines situées sur cette même membrane sont brisées ou si l'ADN mitochondrial est endommagé, la mitochondrie ne pourra pas normalement produire l'énergie (ATP) nécessaire au fonctionnement des cellules. Lorsque la fonction mitochondriale décline, les cellules et des organes entiers peuvent également se détériorer (entraînant des maladies telles que le diabète, la surdité, la cécité et des dysfonctionnements neuronaux comme les maladies d'Alzheimer et de Parkinson).
Toutefois, notre corps possède des mécanismes de réparation intrinsèques. Malheureusement, ces mécanismes ne sont souvent pas très efficaces pour réparer les mitochondries endommagées. Comme pour toutes les caractéristiques du vieillissement, diverses études sont menées pour trouver des solutions possibles qui nous permettront de prolonger notre durée de vie. Un médicament contre le dysfonctionnement mitochondrial est actuellement aux premiers stades des essais cliniques sur les humains. Son nom est le J147. Le but de ce médicament est d'optimiser la production d'énergie des mitochondries afin que, même réduite, elle reste suffisante pour le fonctionnement cellulaire.
Sénescence cellulaire
En vieillissant, nos cellules vieillissent avec nous. En effet, après environ 50 réplications, nos cellules commencent à se dégrader et à perdre leur fonction. En outre, plusieurs facteurs de stress peuvent provoquer la sénescence cellulaire : les dommages à l'ADN, les altérations épigénétiques, le tabagisme et les rayons ultraviolets du soleil.
Lorsque les télomères sont épuisés, les cellules sont incapables de se diviser et attendent que les mécanismes de réparation les fixent. Lorsque ces mécanismes sont incapables de le faire (ce qui arrive plus souvent avec l'âge), les cellules meurent ou deviennent sénescentes.
Pendant notre jeunesse, les cellules sénescentes nous aident à assurer la réparation des tissus et la régénération des plaies et nous protègent du cancer. Mais, au fil des années, elles s'accumulent et commencent à endommager les cellules voisines. En fait, les cellules sénescentes produisent des substances chimiques qui peuvent provoquer une inflammation, interférer avec la croissance cellulaire et activer et désactiver des gènes dans l'ADN d'autres cellules.
Existe-t-il un moyen de détruire les cellules sénescentes sans endommager les cellules saines ? Depuis quelques années, les scientifiques ont mis au point plusieurs médicaments destructeurs de cellules, appelés sénolytiques. Bien que la plupart de ces médicaments n'en soient encore qu'à leurs premiers stades de développement, nous pouvons être optimistes quant au fait que certains remèdes à la sénescence cellulaire sont sur le point d'être découverts.
Épuisement des cellules-souches
Notre corps a besoin de nouvelles cellules en permanence. Pour répondre à ce besoin, nos cellules se divisent plusieurs fois en copies identiques. Comme nous l'avons mentionné, ces divisions sont limitées dans les cellules spécialisées en raison de l'attrition des télomères. Dans les cellules-souches, la possibilité de réplication est presque infinie, grâce à l'enzyme télomérase, qui régénère les télomères.
Malheureusement, plusieurs caractéristiques du vieillissement affectent la disponibilité et l'activité des cellules-souches, produisant le phénomène que nous appelons épuisement des cellules-souches. Par exemple, l'accumulation de dommages à l'ADN peut rendre les cellules-souches sanguines moins efficaces. Le déclin des populations de cellules-souches peut entraîner plusieurs maladies et affections telles que la fragilité, la perte musculaire, l'ostéoporose, l'anémie et une mauvaise fonction immunitaire.
Il existe actuellement plusieurs thérapies à base de cellules souches qui, grâce à l'injection de cellules-souches, peuvent prévenir la maladie, et même aider à la création de nouveaux tissus dans les organes malades.
Altération au niveau de la communication intercellulaire
Nous en arrivons maintenant à la dernière caractéristique du vieillissement. Les organes, tissus et systèmes qui composent le corps humain sont reliés entre eux et leur fonctionnement influence et dépend de ces connexions. Pour communiquer et travailler ensemble, les cellules utilisent un réseau de signaux chimiques dont nous savons encore très peu de choses.
L'altération de la communication intercellulaire est à explique les modifications du système de communication. Le premier signe de cette altération de la communication est l'inflammation chronique provoquée par le vieillissement, qui peut contribuer au développement de l'obésité et du diabète de type 2. De plus, l'inflammation chronique peut influencer négativement l'activité des cellules-souches et inhiber le système immunitaire.
Pour ajouter au problème, les cellules sénescentes produisent également des substances chimiques qui augmentent l'inflammation. Puisque le problème est strictement lié, trouver une solution à la sénescence cellulaire améliorerait également la situation de l'inflammation chronique.
Conclusion
Le processus de vieillissement est constitué de nombreux processus interconnectés. Bien qu'il puisse sembler que cette complexité soit une caractéristique négative pour comprendre le fonctionnement du vieillissement, elle peut aussi être utilisée à notre avantage. En effet, trouver des solutions pour l'une de ces caractéristiques aurait un effet positif sur les autres caractéristiques également.
La technologie médicale fait d'énormes progrès dans la découverte de solutions au vieillissement. Ces solutions pourraient nous permettre de vivre beaucoup plus longtemps à l'avenir.
Si tu veux avoir une chance de voir ce que l'avenir nous réserve, inscris-toi ici et rejoins-nous dans ce voyage ! Si des questions concernant la Biostase te viennent à l'esprit, n'hésite pas à prendre rendez-vous pour un appel avec nous.